III) les effets de miroir

A) un texte en miroir

l’auteur se regarde écrire et écrit sous nos yeux: le texte est le miroir de son écriture, l’énonciation y est présente:

«recomposons» (III)

«que dire maintenant» (XIII)

«Telles sont les chimères» (XIV)

o pour finir, il brise le miroir, cf. «livres si courts qu’on ne fait plus guère». La mort d’Adrienne, juste à la fin, participe à ce bris... de glace! Avec l’annihilation des deux autres héroïnes: d’après Sylvie, Aurélie ne ressemble pas (!) à Adrienne, elle n’en est pas le miroir vivant. De plus, Aurélie disparaît de la vie de Gérard, ou plutôt de celle du narrateur, car ce texte est parfaitement maîtrisé, et peut-être peu autobiographique en ce qui concerne Sylvie et Adrienne - à moins qu’il ne s’agisse de la Baronne Adrien de Feuchères qui achètera en 1835 la maison de l’oncle Boucher à Mortefontaine -, sinon en ses ressorts profonds! Sylvie elle-même est devenue une mère de famille simple, voire simpliste. Gérard appelle son Athénienne Lolotte, ce qui est du plus trivial.

o le je de l’auteur est constant, ce texte est le miroir de lui-même, il se reflète (!) dans ses lectures, ses allusions culturelles, historiques, folkloriques, son amour pour Rousseau, sa connaissance du Valois.

o le thème du double est récurrent: II, «nos tailles étaient pareilles», «cette double image»; III: «la ressemblance»; XI: «comme une sœur, un être de même sang», etc.

o les événements sont en miroir, se répètent:

cf. le «quelquefois» du début.

III

V frère de Sylvie qui intervient, cf. fin du VIII

VI: le narrateur et Sylvie= la tante et son mari

XII: évocation d’Adrienne à Châalis avec Sylvie, XIII évocation d’Adrienne à Châalis avec Aurélie.

Les visites répétées du narrateur chez Sylvie, en XIV

Globalement, l’époque ressemble à celle de Peregrinus et d’Apulée, fin IIème ap. JC.

 

B) les femmes,

trois faces du même miroir: la quête d’une morte? cf. le thème de la femme.

Mais Sylvie est brune, dixit sa tante à Othys!

C) le miroir dans le texte

osous forme de lac, d’étendue d’eau...

IV: «la théorie (procession) se reflétait dans les eaux calmes de l’étang» = positif

fin de IV: «les reflets du ciel sur les ombrages et sur les eaux» = communion avec Sylvie.

V: «les étangs lointains se découper comme des miroirs» = positif; «le miroir gothique reflète les premiers feux du jour» = positif (ce manoir est... entouré d’eau!)

IX: «la tour de Gabrielle se reflète de loin sur les eaux d’un lac» = positif qui devient négatif car le texte continue ainsi: «factice étoilé de fleurs éphémères»; ici, le reflet est celui de la mort (est-ce un fantasme de...                   )

ole miroir: nous avons vu que l’eau-miroir devenait finalement négative: il en est de même pour le miroir lui-même; fragile au début: «je craignais de troubler le miroir magique qui me renvoyait son image» (en parlant d’Adrienne); Sylvie en IV est devenue différente d’elle- même: elle n’est plus son propre miroir; ceci est positif, mais s’avèrera sans lendemain; évanescent, comme l’ovale au cadre doré contenant le portrait du mari de la tante: c’est ici l’image du miroir qui défie le temps; mais la personne elle-même ne subsiste plus que comme image (VI)

Le temple de la philosophie, en IX, n’est plus que la ruine de ce qu’il fut, même inachevé... restera la soif de connaître (ou de se connaître)

Le miroir devient alors pur objet banal, moderne, trivial, comme dans la chambre de Sylvie (X) cf. le contexte très négatif; il brise ainsi l’autre miroir, rencontré en V: «Sylvie se leva joyeusement, arrangea ses cheveux, devant un miroir.»

La chambre de Dammartin, chambre de passage est un «dernier retour vers le bric-à-brac, auquel j’ai depuis longtemps renoncé». Comme attendu, il évoque, juste au-dessus, une... glace!

Le narrateur regarde le bonheur, comme une image dans un miroir: «là était le bonheur, peut-être... cependant...»

Si le miroir n’est pas brisé, il est sérieusement terni.

Le père Dodu, pour finir, ne serait-il pas un miroir du temps? Le narrateur ne vit-il pas dans un autre plan spatio-temporel que nous, puisque sa propre horloge ne marche plus... Le temps est mort (cf. la bête est noyée)... Depuis combien de temps pour G.? Depuis qu’il a perdu celle qu’il recherche toujours, le temps... perdu? comme Proust?