baccalauréat, latin

1) version

2) oral

1) version latine,

L, spécialité

notation, traduction, correction

Cet exercice sur 50 points à l'écrit inquiète trop souvent le candidat (sans sexisme ici!). Pour désacraliser cet exercice, le mieux est de voir comment procède le correcteur chargé de la noter.

(Note bien, lecteur gracieux, que les propos tenus ci-dessous n'engagent en rien  la responsabilité de qui que ce soit: souviens-toi de Ponce-Pilate! donc, aucun rapport avec aucune responsabilité plus ou moins officielle. Notre site est de type ONG)

Reprenons plus sérieusement: Au départ, le correcteur (ou correctrice pour les sado-masos?) dispose du même support que l'examiné. Soit, lors de la session juin 2004, un extrait du livre II de l'Enéide de Virgile, v. 518 - 525, lui-même contextualisé: en effet, il finissait le premier tiers du passage avec traduction, celui qui sert de support aux 5 questions de commentaire. Il est curieux de constater que certains candidats ne se sont pas servis de cette aide et ont traité le texte de la version comme s'il tombait, en aérolithe, d'un autre monde. Ceci a singulièrement obéré d'abord leurs performances, ensuite leur... notation.

Ipsum autem sumptis Priamum juvenalibus armis

ut vidit, # «Quae mens tam dira, miserrime conjux,

impulit his cingi telis? aut quo ruis? » inquit.#

«Non tali auxilio nec defensoribus istis

tempus eget,# non1, si ipse meus adforet2 Hector.#

Huc tandem concede, haec ara tuebitur omnes,

aut moriere3 simul.» # Sic ore effata recepit

ad sese et sacra langaevum in sede locavit.#

1 construire: non (pas même) si ipse meus Hector nunc adforet

2 adforet: équivalent de adesset

3 moriere: équivaut à morieris

1) la traduction, puis la notation:

Chaque correcteur reçoit son paquet de copies (d'une vingtaine à... indéterminé), le sujet à X exemplaires selon le nombre de jurys concernés et... des feuillets officiels présentant des éléments pour la correction.

La version y est traduite, bien sûr, pas toujours comme attendu. Voici celle proposée:

Lorsqu'elle vit Priam devant elle, revêtu des armes de sa jeunesse: «Quelle funeste inspiration, malheureux époux, t'a poussé à ceindre ces armes? oui, où vas-tu te jeter? lui dit-elle. Ce n'est pas tel renfort ni telles défenses que requiert l'heure présente. Non, eussions-nous maintenant mon Hector lui-même. Viens ici, je t'en prie; cet autel nous protègera tous ou tu mourras avec nous.» Ayant ainsi parlé, elle l'attira auprès d'elle et installa le vieillard en ce lieu sacré.

Connaissance prise de ce texte, le groupe de correcteurs - car la première rencontre avec les copies est collégiale afin d'éviter de trop grosses distorsions dans la notation - traque d'abord les imprécisions - comme attendu; ainsi: autem, au début, n'est pas traduit; très élégamment, ipsum, lui-même, en personne, devient: «devant elle». Le tam devant dira a disparu, mystérieusement; le superlatif au vocatif, miserrime, est raboté. On s'esclaffe devant les archaîsmes: «tel renfort», puis: «que requiert l'heure présente» (traduction-commentaire pour: tempus). Le tandem se transforme, certes judicieusement, en : je t'en prie.

Toutes ces remarques auront une incidence sur l'étalonnage de la notation devenue ainsi commune.

Ensuite, le barème est appliqué au texte; pour aller plus vite, je te donne, bloc de mots par bloc de mots, les résultats des cogitations du groupe, ces propos n'engageant aucun des participants, que tu aurais d'ailleurs du mal à repérer! Le but de ces informations est, encore une fois, de déminer au max. le pensum qui t'attend à la prochaine session.

  1. Ipsum autem sumptis Priamum juvenalibus armis

ut vidit, # rapporte 8 points

Mais ceci est trop vague pour obtenir une notation cohérente à l'intérieur du groupe des correcteurs (le masculin l'emporte, grammaticalement, sur le féminin). Il faut affiner. Donc, (qui a dit que les profs ne foutaient rien et n'en avaient rien à foutre du bac? Car les libéraux sont vulgaires...)

Ut vidit, traduit en temporelle au passé composé/passé simple, rapporte 2 (1 avec traduction au présent, comme videt; une concessive ne rapporte rien: l'erreur est trop grossière); si le sujet est: «elle» (=Hécube), 1 (car l'élève a tenu compte du contexte), sinon, rien.

= Priamum ipsum en cod=2, chacun des deux valant 1;

l'ablatif absolu= 3. La solution semblant évidente, oui ou non (comme en programmation basic), ces points n'ont pas été plus finement différenciés ... La correction des copies prouvera combien le groupe était, malgré son expérience professionnelle avérée (2 chevaux de retour pour une cavale fraîchement émoulue de l"université), optimiste... sine commentariis.

Soit les 8 points attendus (2+1+2+3)

  1. «Quae mens tam dira, miserrime conjux,

impulit his cingi telis? aut quo ruis? » inquit.# = 10, ce qui donne les débris suivants:

quae mens tam dira=2 (+1 de bonus pour ceux qui, au rebours de la traduction proposée, traduisent cet intensif - même si le résultat final fleure le bouteur!)

miserrime conjux=2, (1 pour l'apostrophe, 1 pour le superlatif; le passage au féminin, si tout le reste est bon, vocatif et superlatif, rapporte tout de même 1)

impulit au passé composé/passé simple: 1 (car il faut trouver impello - tant mieux pour ceux qui ont un dictionnaire complexe, avec parfait irrégulier en entrée: en spécialité, un tel ouvrage est bien le SMIG: Solution Minimale Intellectuellement Garantie)

cingi his telis=2 (sans attendre bien sûr: «ceindre» ; N.B.: ce verbe a été envisagé comme pouvant rapporter 0.5 de bonus pour potentialiser les bonnes copies et augmenter ainsi l'empan de la notation, trop souvent réduit)

aut quo ruis=2, en acceptant bien sûr le cacophonique: «ou où»  suivi de l'inélégant: «te précipites-tu» . Mais le groupe est conscient que le dictionnaire est un faux ami, qui rassure aussi!

inquit=1, avec «elle»  sujet, of course, au passé simple, difficilement décelable dans un: «dit-elle»  mais le doute profite à... l'accusé?

  1. Non tali auxilio nec defensoribus istis

tempus eget,# = 8, soit le découpage suivant:

tempus eget: «le temps/l'occasion/les circonstance a besoin»  (présent; 1  seulement si traduction avec ago)=3

Non... nec: traduction du balancement=1

tali auxilio=2 sans plus de précision: ça passe ou ça casse!

istis defensoribus=2 (après contrôle sur dico, suite à lecture d'une copie, «défenses»  et «défenseurs» , un peu niais, sont acceptés); on ne jouera pas sur le sens du démonstratif de l'interpellé: ISTE...

  1. non1, si ipse meus adforet2 Hector.# = 6

immédiatement, sans négociation, non: «pas même» = 1; je sais, c'est indiqué en note. Sais-tu que la plupart des lecteurs ignorent ostensiblement, expérience moult fois réitérée, l'aide que les notes sont censées leur apporter? Récompense aux modestes!

si=1 (oui, on oublie souvent aussi les subordonnées - je vois d'ici quelles gorges chaudes en feraient les vieux réacs!)

ipse meus Hector= 2 si sujet, les 3 mots étant traduits.

adforet: 2 (facile? Que non pas, le groupe l'a senti. Les échecs patents constatés ont vérifié cette appréhension! - et sors ton mouchoir.)

  1. Huc tandem concede, haec ara tuebitur omnes,

aut moriere3 simul.» # = 9

huc et tandem=0, 5 chacun

concede=2 si impératif 2ème; la traduction par: «sors»  est acceptée, au détriment alors de HUC qui ne correspond plus, comme attendu, à: QUO...

haec ara= 1 si sujet

tuebitur=1 si futur (curieusement, occulté par sa formation, le groupe n'a pas envisagé l'interprétation par un passif (un bon quart des copîes), car qui ne connaît ce traître de déponent?. Solution évidente: la moitié des points (1/5) est alors affectée sur les 3 du groupe, si le reste est correct, bien sûr)

omnes= 1 avec un point de bonus pour: «tout le monde»  (correction collégiale d'une bonne copie... par respect humain, on t'épargne ici les (assez) rares mauvaises: certains jouent au bilboquet avec les mots).

aut moriere= 2 (temps=1, personne=1)

simul=1, ce qui fait bien en tout 9 (ouf! on en a bavé.)

  1.  Sic ore effata recepit

ad sese et sacra langaevum in sede locavit.# = 9 (si tu as tout suivi jusqu'ici, nous arrivons aux 50 points avec ça; tu me diras: et si je traduis parfaitement la moitié du texte, j'ai la moitié des points? Bien sûr! Il n'est pas interdit de rêver. L'expérience prouve tout de même que ceux qui font le moins sont rarement ceux qui obtiennent le plus. Mais en fonction du temps restant... question de stratégie personnelle...)

Sic=1 (petit mot souvent oublié, par une inadvertance fréquente en examen)

ore effata=2 (déponent; donc, «ayant parlé de sa bouche»  - pléonasme? insistance sur l'émettrice, Hécube, et l'efficacité attendue de sa parole, ce qui sera le cas...); nominatif? assuré par la scansion...

recepit longaevum ad sese= compliqué! passé composé/simple=1: cod=1; ad sese=1; avec + 1 de bonus pour ceux qui ont bien compris que longaevum était en facteur commun avec les deux verbes car longaevum sera sans doute traduit avec locavit dans les copies medium), donc 3

et locavit=1

in sede sacra= 2; la structure du GN est assurée par la scansion

2) quelques petits problèmes de traduction

juvenalibus: d'après d'aucuns, le jeune homme ne serait pas Priam, avant (il y a des lustres!), mais «des jeunes gens en armes»  - avec un adjectif substantivé c. d'agent sans ab, possible en poésie et même ailleurs, voire «des armes de jeunes gens» . Ces (mauvaises) solutions amènent à un 2, voire 2,5 sur 3: l'essentiel était le repérage de l'ablatif absolu, structure incontournable en latin! Nonobstant, la tournure par: «Priam ayant pris ses armes juvéniles» est acceptée, malgré le doute sur la compréhension de la structure par le candidat...  Dans ce cas, l'intelligence du texte prime (qualité recherchée en principe, mais pas toujours réalisée, au vu de certaines traductions)

Autre classique à repérer: la proposition infinitive, ici au passif de : cingi his telis... Comme quoi l'extrait était judicieux... Remarquons en passant la précision des démonstratifs: his sont bien les armes du mari, istis soulignant péjorativement leur inefficacité.

L'ambigu: eget («a besoin de» , donc aussi: «manque de» ) laisse le correcteur dans une expectative... positive.

J'ai trouvé un fautif, mais très estimable: recepit effata ore ad sese, «il reçut les paroles (émises) de sa bouche vers lui-même»  (donc en son for intérieur?); pas mal, malgré l'erreur du passage du déponent au passif, pas si rare d'ailleurs. Tournure grecque, certes, mais possible. Tout ceci chez un candidat qui a cru que le sujet de recepit était: Priam. résultat: sur les 4 points en litige, j'en ai mis 3. Toute peine mérite salaire. Là, chapeau! Quelle leçon retenir? Ne pas tenter n'importe quoi, rester cohérent, respectueux de la morpho-syntaxe latine. Et la récompense viendra: tous les correcteurs ne sont pas des ogres assoiffés de sang. Si l'aberration s'explique par l'application des règles latines, après un embranchement mal pris, on n'assassine pas celui qui s'est trompé de parcours, en toute bonne foi.

3) exemples de correction (copies retravaillées):

a) résultat: 40/50)

commentaires: chaque phrase est à peu près comprise - mais l'ensemble vous a, hélas - car vous sentez bien le latin - échappé.

traduction:

Mais (penser à traduire autem ne rapporte rien, mais fait bonne impression et peut amener à une vision moins négative d'une erreur ultérieure), dès qu'elle vit que Priam lui-même avait saisi les armes faites pour des jeunes gens= 7/8: certes, le latin est assez loin, mais le sens est dégagé; vu l'autem: correct.

«quel esprit si (+1) funeste (2), mon pauvre époux (1), t'a poussé (1) à te couvrir de telles armes (2)? Et où cours-tu donc? (2; le donc est très bien vu; mais un bonus n'a pas été prévu collégialement)», dit-elle (1), soit 10/10, le bonus du si équilibrant la perte sur l'absence du superlatif.

«Dans ces circonstances, on ne peut se passer ni d'un tel secours ni de ces protections-là; le doublet est compris: 1, les 2 compléments aussi: 4; le reste est en contre-sens, dû à l'ambiguïté de: EGET, un bel effort, malheureusement avorté, sur: TEMPUS, donc: 1,5, soit=6,5/8, car c'est intelligent.

pas même si mon Hector était encore à mes côtés. l'adverbe est acceptable pour: NUNC, mais il manque: IPSE, donc: 5/6.

Eloigne-toi enfin d'ici; (2,5, car le HUC est fautif - concede au sens premier, d'après le Gaffiot signifiant bien l'éloignement); cet autel veillera sur tous, (1x3), ou tu mourras (2) en même temps (1).»

Ainsi (1), devant les propos qu'il avait tenus (accord apprécié, 1), elle prit sur soi (1) et plaçait les objets sacrés (pris pour un acc. pl. alors que c'est un a long) d'un grand âge (acc. de qualité?) dans leur siège (1 pour l'ensemble, comme quoi le bac n'est pas bradé!), soit 3.

Tu vois que l'exercice est très accessible, sans que la qualité de l'exercice s'en ressente, à l'encontre des litanies dépréciatives de vieilles barbes. Accessible, je l'affirme et n'en veux pour preuve que la version suivante qui a obtenu la moyenne (comme quoi!):

b) résultat: 25/50

commentaire: le barème vous a aidé. Quelques éclairs.

traduction:

Il vit (o,5) Priam (1) cependant il serrait le jeune homme par les épaules.= 1,5

Quelle pensée si funeste (3), la plus malheureuse (1) des épouses, poussa (2) celui-ci à se couronner (1) d'aiguillons, ou bien où te précipites-tu? (2), dit-il (0,5), donc: 9,5

Pas d'une telle aide de celle-ci (1), le temps manque aux défenseurs (2): notation apparemment sévère, certes, mais le jargon est insupportable..., donc: 3

pas même (1) si (1) Hector lui-même (1,5) comparaît à mon jugement en cet instant (1), donc: 4,5

Enfin  (0,5) il quitte ce lieu; vous veillerez sur tous ces autels ou bien vous mourrez (1) ensemble (1), donc 2,5

Ainsi (1), il reçut la sentence de sa bouche à la sienne et la cérémonie religieuse plaça  (1) le vieillard (1) dans sa dernière demeure (1 pour l'effort d'éclaircissement: on en avait besoin ici!), donc: 4

Que conclure ? De toute évidence, la version ci-dessus présente des éclairs de compréhension, ils sont certes fugaces,  mais restent estimables, car les erreurs reposent sur des approximations, en fait un manque de rigueur grammaticale. L'objectivité de la docimologie me contraint à avouer ici une interprétation trop favorable en faveur du candidat; la copie présentait: par quelle pensée si funeste, la plus malheureuse des épouses, poussa celui-ci à se couronner d'aiguillons. Ayant barré le: par (automatisme du correcteur), la présence des deux virgules m'a leurré et conduit à considérer ce sujet (?) comme une apostrophe, et à ne plus voir le: par, certes barré, mais de mon propre rouge; en fait, au lieu de 3, c'était: 2 max. C'est ce que je constate en retravaillant cette copie pour le oueb. En toute logique, comme ce travail est totalement déconnecté d'une copie réelle précise, il n'a pas amené à un changement dans la notation, a posteriori...

Bonne méditation. Car tout ceci pour pousser à réfléchir, ce n'est pas absolument pas destiné à une utilisation en dehors de Lutèce.

signé:

un correcteur anonyme qui n'avoue ni son nom, ni sa fonction, ni son grade, ni l'académie dont il relève, ni l'origine précise - qu'il ignore de facto - des copies corrigées.

2) oral

préparation: 30 ', passation: 15 '

barème (au moins dans une académie, celle de Haute-Normandie, d'après le forum musagora):

2 points pour la présentation du texte: l'auteur, sa vie, son oeuvre, son texte (genre littéraire, objectifs, contexte permettant de passer sans rupture à la lecture de l'extrait à traduire)

2: la lecture de l'extrait à traduire se doit d'être correcte, sans chercher les effets de manche, ni un ton, fort improbable: il est inutile de fleurter avec l'artifice.

7: traduction par groupe de mots, proche du texte; privilégier la précision sans passer par les miroitements trompeurs de la belle infidèle, car ceci n'amènerait que des demandes d'éclaircissements de la part du correcteur

7: commentaire, en deux points si possible, mais ce summum, s'il s'avère artificiel, rapportera moins qu'une commentaire linéaire, appuyé sur des renvois précis au texte, à sa facture rhétorique; l'étude du fond s'appuie aussi sur la forme!

2: conclusion, avec résumé des acquis, puis ouverture sur d'autres textes, d'autres autres, voire des textes littéraires en français.

La note mise, la confrontation d'un court extrait avec sa traduction universitaire ne peut que rapporter des points en plus, 3 max. Donc l'élève qui a 17 peut, avec ce bonus, monter à 20 (il n'est pas prévu un 23 sur 20, pour l'instant).

Bonne chance

HS