le tout: Hubert Steiner
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Quis fuit, horrendos primus qui protulit enses?
Quam ferus et vere ferreus ille fuit!
Tum caedes hominum generi, tum proelia nata,
tum brevior dirae mortis aperta via est.
An nihil ille miser meruit, nos ad mala nostra
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vertimus, in saevas quod dedit ille feras?
Divitis hoc vitium est auri, nec bella fuerunt,
faginus adstabat cum scyphus ante dapes.
Non arces, non vallus erat, somnosque petebat
securus varias dux gregis inter oues.
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Tunc mihi vita foret, vulgi nec tristia nossem
arma nec audissem corde micante tubam;
nunc ad bella trahor, et jam quis forsitan hostis
haesura in nostro tela gerit latere.
Sed patrii servate Lares: aluistis et idem,
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cursarem vestros cum tener ante pedes.
Neu pudeat prisco uos esse e stipite factos:
sic veteris sedes incoluistis avi.
Tum melius tenuere fidem, cum paupere cultu
stabat in exigua ligneus aede deus.
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Hic placatus erat, seu quis libaverat uva,
seu dederat sanctae spicea serta comae;
atque aliquis voti compos liba ipse ferebat
postque comes purum filia parva favum.
At nobis aerata, Lares, depellite tela,
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hostiaque e plena rustica porcus hara;
hanc pura cum veste sequar myrtoque canistra
vincta geram, myrto vinctus et ipse caput.
Sic placeam vobis: alius sit fortis in armis
sternat et adversos Marte favente duces, 30
ut mihi potanti possit sua dicere facta
miles et in mensa pingere castra mero.
Quis furor est atram bellis arcessere Mortem?
Imminet et tacito clam venit illa pede.
Non seges est infra, non vinea culta, sed audax
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Cerberus et Stygiae navita turpis aquae;
illic perscissisque genis ustoque capillo
errat ad obscuros pallida turba lacus.
Quin potius laudandus hic est, quem prole parata
occupat in parva pigra senecta casa!
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Ipse suas sectatur oves, at filius agnos,
et calidam fesso comparat uxor aquam.
Sic ego sim, liceatque caput candescere canis,
temporis et prisci facta referre senem.
Interea Pax arva colat: Pax candida primum
45
duxit araturos sub juga curva boues,
Pax aluit vites et sucos condidit uvae,
funderet ut nato testa paterna merum;
Pace bidens vomerque nitent, at tristia duri
militis in tenebris occupat arma situs.
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Rusticus e lucoque vehit, male sobrius ipse,
uxorem plaustro progeniemque domum.
Sed Veneris tum bella calent, scissosque capillos
femina perfractas conqueriturque fores;
flet teneras subtusa genas, sed victor et ipse
55
flet sibi dementes tam valuisse manus;
at lascivus Amor rixae mala verba ministrat,
inter et iratum lentus utrumque sedet.
A lapis est ferrumque, suam quicumque puellam
verberat: e caelo deripit ille deos.
60
Sit satis e membris tenuem perscindere vestem,
sit satis ornatus dissoluisse comae,
sit lacrimas movisse satis: quater ille beatus,
quo tenera irato flere puella potest.
Sed manibus qui saevus erit, scutumque sudemque
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is gerat et miti sit procul a Venere.
At nobis, Pax alma, veni spicamque teneto,
praefluat et pomis candidus ante sinus.
(texte contrôlé sur l'édition Hatier/les Belles Lettres)
Qu'il est plus digne d'envie celui qu'une lente vieillesse surprend, parmi ses enfants, dans sa petite chaumière! Il garde lui-même ses brebis, et son fils ses agneaux, et son épouse prépare l'eau chaude qui le délasse. Que cette vie soit la mienne! qu'il me soit permis de voir vos cheveux blanchis et de raconter, vieillard, les histoires du vieux temps! Cependant, que la Paix féconde nos campagnes! C'est la blanche Paix qui, la première, conduisit sous le joug recourbé les boeufs du laboureur. C'est la Paix qui nourrit les vignes et renferma les sucs de la grappe, pour que la cruche du père versât au fils le vin. C'est la Paix qui met en honneur le hoyau et le soc, tandis que dans un coin obscur, la rouille s'attache aux tristes armes du dur soldat... et le paysan, au retour du bois, un peu ivre lui-même, ramène dans son chariot sa femme et ses enfants à la maison. Mais alors s'allument les guerres de Vénus, et la femme éclate en plaintes contre celui qui lui a arraché les cheveux et brisé sa porte. Les pleurs arrosent ses tendres joues meurtries; mais le vainqueur lui-même pleure du beau triomphe de ses mains démentes. Cependant l'Amour lascif attise la querelle par de méchants mots et reste assis impassible entre les deux combattants irrités. Ah!il est de pierre ou de fer, celui qui frappe son amie : il arrache les dieux du ciel. Qu'on se contente de déchirer le léger vêtement qui couvre ses membres, qu'on se contente de défaire les ornements de ses cheveux, qu'on se contente de la faire pleurer : quatre fois heureux celui qui peut, par sa colère, faire pleurer une tendre amie! Mais celui qui a des mains cruelles n'est bon qu'à porter le bouclier et le pieu, à s'éloigner de la douce Vénus. Mais viens parmi nous, Paix nourricière, un épi dans la main, et laisse couler devant toi les fruits de ta robe blanche!
Ce poème est chronologiquement le premier à avoir été créé par Tibulle. Sa critique des activités guerrières peut sembler paradoxale puisque, datant de la fin 31, elle suivrait de peu la bataille d'Actium (1er août 31), qui a libéré Rome du danger présenté par les orientaux avec Marc-Antoine et Cléopâtre. Mais c'est que son ami Messala est beaucoup mieux armé que notre poète pour affronter les hasards de la guerre. Ce dernier se voit bien vieillir sans se préoccuper des marques d'honneur et de reconnaissance dont les autres sont friands. C'est donc un vibrant appel à la paix qu'il lance à la fin de son premier livre.
QUIN POTIUS LAUDANDUS EST vraiment doit être plutôt loué HIC QUEM SENECTA PIGRA celui que la vieillesse qui rend paresseux (ou qui vient lentement) OCCUPAT IN PARVA CASA prend + avec elle + dans sa petite chaumière PROLE PARATA sa descendance étant prête (ablatif absolu) > toute descendance assurée (essentielle pour un romain: c'est son gage de survie après la mort: les cérémonies funéraires sur la tombe seront assurées et il laissera - au moins pour un temps ! - son nom, sa MEMORIA.) IPSE SECTATUR SUAS OVES Lui-même suit ses brebis (SECTOR avec le suffixe fréquentatif suivant SEQUOR, puisque cette activité est répétée; N.P.C. avec sectateur ou secte, issus de sec, couper, cf. sécateur!), AT FILIUS AGNOS son fils ses agneaux, ET UXOR COMPARAT FESSO, sa femme prépare (cf. PARATA en 39) pour son homme fatigué AQUAM CALIDAM de l'eau chaude (coordination, vu l'absence de ponctuation à l'époque en: AT puis ET; remarquons en passant la répartition du travail. L'eau chaude permet de se délasser en se nettoyant de la poussière des travaux des champs). SIM EGO SIC Puissé-je moi-même être ainsi, QUE LICEAT CAPUT CANDESCERE CANIS et qu'il soit permis que + ma + tête (Rat interprète par: vos têtes, ce qui me paraît une INTERPRETATIO DIFFICILIOR) blanchisse de vieillesse (adj. substantivé CANI CANORUM cheveux blancs, sens ici abstrait) ET SENEM REFERRE et que vieillard je rapporte FACTA TEMPORIS PRISCI les histoires (et non les hauts faits puisque justement il refuse la vie militaire... à moins qu'il ne se désigne comme le seul survivant, ceux comme Messala ayant accompli les hauts portés par la rumeur étant tous morts?) du temps passé. INTEREA PAX COLAT ARVA Entre-temps, que la Paix protège nos champs (Budé et M. Rat proposent: fécondent; le sens global est... clair: seule la paix permet de cultiver correctement; c'est la condition sine qua non de la réalisation des Géorgiques de Virgile!): CANDIDA PAX DUXIT PRIMUM C'est la blanche (par opposition à ATRAM MORTEM du v. 33, là où les cheveux justement sont noirs car brûlés: USTO CAPILLO, vu l'usage de la crémation) paix qui a conduit en premier SUB JUGA CURVA sous le joug (le français utilise le singulier distributif) recourbé BOVES ARATUROS les bœufs pour qu'ils labourent (participe futur). PAX ALUIT VITES La paix a nourri les vignes ET CONDIDIT SUCOS UVAE et renfermé les sucs de la grappe, UT TESTAPATERNA pour que le goulot paternel (TESTA est le mot vulgaire utilisé par l'argot des envahisseurs romains, soldats comme marchands et colons pour ce que la langue relevée désignait par: CAPUT; nous avons le même dérivé avec: gueule dans le jargon actuel) FUNDERET NATO MERUM répande/verse pour son fils du vin pur. Le hoyau et le soc + de la charrue + NITENT PACE brillent à cause de la paix (la terre frotte le métal qui n'est donc pas rouillé), AT SITUS OCCUPAT TRISTIA ARMA mais la rouille s'attache aux tristes armes DURI MILITIS IN TENEBRIS du dur soldat dans les ténèbres.
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QUE RUSTICUS MALE SOBRIUS IPSE Et le paysan (mal sobre) un peu ivre lui-même VEHIT E LUCO transporte hors du bois sacré (il a participé à des libations religieuses) DOMUM UXOREM PROGENIEMQUE PLAUSTRO chez lui sa femme et sa progéniture sur son chariot (avec une truculence à la Bruegel, déjà annoncée par le MERUM). SED TUNC BELLA VENERIS CALENT Mais c'est alors que les guerres de Vénus s'allument, QUE FEMINA CONQUERITUR et la femme déplore CAPILLOS SCISSOS (SCINDO) ses cheveux arrachés QUE FORES PERFRACTAS et la porte complètement brisée; FLET SUBTUSA TENERAS GENAS elle pleure, meurtrie quant à ses tendres joues (acc. de relation); SED ET IPSE VICTOR FLET Mais aussi de lui-même le vainqueur pleure SIBI MANUS DEMENTES pour lui-même que ses mains prises de folie VALUISSE TAM aient eu des forces à ce point; AT AMOR LASCIVUS MINISTRAT Cependant Amour lascif MINISTRAT MALA VERBA RIXAE pourvoit aux (mauvaises paroles) injures de la dispute (MINISTER=serviteur (sic!) - à méditer d'urgence, en cette période de reconstruction de la république - et non raie publique comme l'appelait l'extrême droite: n'oubliez jamais que Maurras, penseur en chef de ces extrémistes a écrit, lors de l'effondrement de notre pays en 1940: Divine surprise; à une telle forfaiture, il ne peut y avoir ni prescription, ni pardon, ni surtout confiance en des gens qui ne se réclament de la démocratie ou de la voix du peuple que pour mieux l'étrangler!!! Pour cela, la démagogie est bonne sorcière. Bon, j'ai poussé mon cri... Je reprends (sic!) Tibulle...) ET LENTUS et impassible SEDET INTER UTRUMQUE IRATUM il reste assis entre les deux + partenaires + pleins de colère. A EST LAPIS QUE FERRUM Ah! Il est + de + pierre et + de + fer, QUICUMQUE VERBERAT SUAM PUELLAM celui qui frappe son amie (copine? Les machos, essayez de comprendre ça!) ILLE DERIPIT DEOS E CAELO Celui-ci arrache les dieux du ciel (=c'est un torche-cul de Satan, pour être aussi choquant que Tibulle!). SIT SATIS (Qu'il soit suffisant) Qu'on se contente PERSCINDERE TENUEM VESTEM E MEMBRIS d'arracher le fragile vêtement (de) + qui recouvre + ses membres. SIT SATUIS DISSOLUISSE Qu'on se contente d'avoir défit ORNATUS COMAE les ornement de sa chevelure, SIT SATIS MOVISSE LACRIMAS Qu'on se contente d'avoir (bougé) fait couler ses larmes: QUATER BEATUS ILLE QUO IRATO 4 fois heureux celui à cause duquel, irrité, sa tendre amie peut pleurer. SED QUI ERIT SAEVUS MANIBUS Mais celui qui sera cruel avec ses mains (un sadique?) IS GERAT SCUTUMQUE SUDEMQUE que celui-ci porte le bouclier et le pieu (charge standard du légionnaire en marche, le pieu pour construire rapidement son camp, à la fin de l'étape de 20/30 k/jour!) ET SIT PROCUL A MITI VENERE et qu'il soit loin de la douce Vénus. AT VENI NOBI Mais viens parmi nous, PAX ALMA paix nourricière (futur(e) étudiant(e), sachez que l'université s'appelle: ALMA MATER, la mère nourricière de votre esprit - certains, et en certaines matières, ne risquent pas l'overdose!) QUE TENETO SPICAM et tiens, je t'en prie - impératif futur solennel - un épi + à la main + ET SINUS CANDIDUS et que le pli blanc + de ta robe + PRAEFLUAT POMIS ANTE laisse couler des fruits devant toi...
1) (plan) un tableau, non pas idyllique puisque l'on y parle peu d'amour au début, sinon pour la reproduction (PROLE PARATA en fin de 39, FILIUS en 41, voire les NEPOTES car à qui d'autre REFERRE FACTA PRISCI TEMPORIS - 44? PROGENIEM 52), mais bucolique, à plus proprement parler agreste: OVES, AGNOS, ARVA, VITES, VOMER, RUSTICUS car les bovidés n'interviennent que plus tard: BOVES en fin de 46 où l'on passe d'un vieillard emblématique au poète puis à la paix (45, deux fois en début de 47, comme en 49), la seule guerre (BELLA: 53) envisageable - même si c'est pour la rejeter en dernière analyse - étant celle propre au couple (VENERIS, 53), en une querelle de ménage (de registre comique: FLET deux fois, par ex. en 55 - 56), comme l'extrême: PERFRACTAS en 54, avec son ambiguïté érotique, comme d'ailleurs le VALUISSE; cette veine perdure avec l'insistant LASCIVUS AMOR où le coït est très nettement rapproché de la guerre: BELLA VENERIS en 53, SUBTUSA en 55, RIXAE, compte non tenu du rapprochement incongru - ou une technique sensuelle - IRATUM LENTUS. La veine comico/érotique se poursuit: LAPIS ET FERRUM sont des symboles phalliques évidents, malgré l'anachronisme de cette remarque, mais le VERBERAT PUELLAM en 59 - 60 est sans fard. Les SIT SATIS montrent bien que l'homme ne doit/ ou ne peut pas? aller bien loin et ne peut jamais vraiment régler les comptes. Certes, le corps féminin est bien dénudé: PERSCINDERE VESTEM TENUEM (tenue adéquate) E MEMBRIS; et le DISSOLUISSE? comme les LACRIMAS; mais notons le comique du retournement: QUATER BEATUS etc. Il n'est pas si fréquent, il est même très rare pour Tibulle qu'une amie aime assez son amant pour pleurer en cas de colère de ce dernier - sans, apparemment, qu'il y eût besoin de coups: cela semble un cas digne des annales, vu la tournure des vers... quoi qu'il en soit, PUELLA FLERE semble bien une obsession chez Tibulle, ou, du moins, un des ressorts comiques les plus sûrs pour le goût romain: leurs mimes n'étaient guère raffinés. Donc, comme de juste, et dans tous les sens du terme, la femme - a fortiori à l'époque romaine - a le dessous face à son mari trop facilement excusé par le MALE SOBRIUS (SCISSOS CAPILLOS en fin de 53, PERFRACTAS FORES en un hystéron-protéron, SUBTUSA TENERAS GENAS).. Mais, un instant chassée par l'incompatibilité des caractères et par le déchaînement du mari - oscillant entre la violence (VERBERAT en début de 60, DERIPIT: c'est un sacrilège) et un début de jeu érotique (IPSE FLET annonce PERSCINDERE VESTEM TENUEM, DISSOLUISSE ORNATUS COMAE, voire FLERE PUELLA car ceci permet la réconciliation) qui semble tourner, non pas court (sic!), mais mal (SAEVUS, PROCUL A VENERE MITI), la paix revient: 67, pour le couple d'ailleurs et non, de façon amusante, pour le soldat qui subit ses épreuves pour avoir frappé sa douce? cf. SCUTUMQUE SUDEMQUE IS GERAT en 65-66... Nous avons vu par ailleurs l'aspect comique du texte, n'accentuons pas son côté érotique... Mais le AT NOBIS (qui, vu la date de rédaction ne peut renvoyer au couple Tibulle-Délie, mais concerne en fait les 3 facettes de notre auteur: le poète - amené par définition à exprimer ses amours pour un être, soit une femme-muse, nommée Délie, soit un jeune homme (Marathus), le paysan dont il a la nostalgie, le soldat qu'il est appelé à être, puisque de la suite de Messala), oui, ce NOBIS qui inclut aussi le lecteur/auditeur clôt heureusement ces appels réitérés au bonheur le plus simple, plénitude de l'estomac, du cœur/esprit (PAX) et du désir; voilà un beau final, et pour cette élégie X, et pour le livre premier du recueil... ce qui est bien curieux vu le contenu théorique de ce type d'ouvrage littéraire...
2) une série de notations bien vues: Ce tableau nous fait contempler de très brèves, mais vivants tableautins qui ont la marque de la chose vécue. Ils sont d'ailleurs en correspondance avec l'intérêt réel éprouvé par les romains pour la chose paysanne. Est-ce nostalgie de leur lent développement? Même les INSULAE avaient leur jardin en trompe-l’œil. Motifs floraux et scènes paysannes abondent sur les fresques de Pompéi. Nous en avons ici littérairement un équivalent dans la première partie du texte, le deuxième renvoyant plus aux Atellanes, où le comique d'une scène de ménage suite à une trop forte consommation de vin par le mari éméché renvoie curieusement, et non sans humour, à la violence des soldats. Le terme PAX ALMA, comme les inscriptions murales avec leur concision, vient alors donner sa cohérence au texte: ALMA pour le premier volet, PAX pour le second...
un sentiment profondément vieux romain: le désir de descendance (PROLE PARATA, repris par FILIUS en 41, NATO en 48, PROGENIEM 52), la capacité à se contenter de peu: PARVA CASA, le soin des troupeaux d'ovins, abondants sur les collines (OVES, AGNOS): n'oublions pas que les premiers romains étaient des bergers sur les 7 collines de Rome, la femme gérant la maison et aux petits soins pour son homme (42), avec l'image de l'ancêtre expérimenté propre aux sociétés traditionnelles. Les bœufs, élevés non pour la viande mais pour tirer la charrue, en BIJUGUM car la terre des plaines du Latium, issue d'anciens marécages, était lourde, devait être drainée en permanence et un tel attelage, en fait, hautement technique, était nécessaire pour une telle exploitation. Et la moisissure sur les armes? N'oublions pas que c'est Marius qui a créé l'armée de métier: chacun, comme dans l'armée suisse, gardait au départ ses armes chez lui: il n'y avait pas d'arsenal. Le second volet sur les relations homme-femme ou amant-maîtresse laisse plus perplexe. Est-ce une première amorce d'embryon de reconnaissance de la femme, sinon comme une égale, du moins comme une personne qui n'a pas à être violemment maltraitée en cas de mauvaise volonté... Il est vrai que si la situation des femmes romaines était préférable à celle des grecques, seules celles de la haute société tiraient bien leur épingle du jeu, à leur corps donnant, bien sûr. Le VULGUM PECUS lui était plus proche du comportement de nos ancêtres du XIX, voire du XX, et même actuellement: Merci à l'association des femmes battues; pensons au traitement des femmes en Inde ou à celui subi par les mêmes dans les sociétés musulmanes traditionnelles (une anecdote personnelle: au cours d'une traversée du Sahara il y a plus de 20 ans certes, dans un coin à gravures rupestres, un quadragénaire m'a invité à prendre le thé dans son gourbi: il avait travaillé 20 ans chez Renault. Sa femme rentre, je me lève pour la saluer. Et lui: «Qu'est-ce qui te prends? Dis-tu bonjour à ton chien?»). Tout le texte serait à citer ici, en tenant compte d'un décalage social, car passe encore de briser la porte (54), on en sache pas que les paysannes romaines aient arboré une chevelure complexe que semble impliquer le SCISSOS CAPILLOS; certes les joues pouvaient être blanchies à la craie. Mais toutes ne devaient pas être bien tendres (55). Par contre le mari devait se glorifier de son triomphe: VICTOR ET IPSE, un peu penaud peut-être, une fois la pulsion sexuelle satisfaite: FLET MANUS DEMENTES VALUISSE. Alors les insultes de fuser: MALA VERBA. On a bien l'impression que Tibulle mêle ici deux niveaux sociaux. Ceci est corroboré ensuite par: TENUEM VESTEM (61), ORNATUS COMAE. Ceci fleure plutôt le règlement de compte avec une MERETRIX de haute volée. Mais de la part d'un jeune homme de bonne famille: celui qui ne sait pas maîtriser sa violence est bon pour ses 20 ans de service militaire...
3) Avec la présence du poète qui rend ce passage d'autant plus touchant qu'il s'agit d'un lieu commun auquel Tibulle arrive à donner, oserions-nous dire, vu son obsession de la vieillesse, (PIGRA avec son jeu de mot SENECTA en 40, CANDESCERE CANIS avec sa figure étymologique, SENEM les deux derniers en fin de vers, que la TESTA soit PATERNA implique que le père ait dépassé la première jeunesse pour verser du vin pur, MERUM à son fils, ce qui implique que ce dernier est adulte) une nouvelle jeunesse, pour ne par écrire: un nouveau brillant: PACE BIDENS VOMERQUE NITENT... avec le jeu des couleurs dans ce passage, implicite ou explicite: CASA avec ses tuiles rouges, OVES, AGNOS blancs, CANIS, ARVA (labourage et pâturage), CANDIDA pour la paix, du fait de son vêtement: SINUS CANDIDUS en 68, JUGA (en bois), BOVES (cf. leur robe), VITES, la couleur des grappes: SUCOS UVAE, MERUM; en contraste avec le brillant déjà rencontré: SITUS, IN TENEBRIS (50), LUCO (vert), PLAUSTRO (marron, gris), CAPILLOS, GENAS, le sang impliqué par les coups violents de 55 à 64, avec la peau plutôt rose de la femme, vu les deux TENER en 55 et 64, le jaune du SPICAM en 67, et le polychrome des POLIS au dernier vers. IL y a là la sensibilité du poète aux objets, aux couleurs, aux mouvements et réactions eux-mêmes, si nous reprenions en détail, ce qui serait fastidieux, l'évocation vivante et assez effrénée de la scène de ménage, subtilement entrecoupée par un temps d'invectives (57 - 58 où le LASCIVUS préfigure déjà que la réconciliation aura lieu par la voie sexuelle: le LENTUS montre qu'il attend son heure), avant la dernière reprise qui achève le tout... On a là un sens du réalisme, du détail vécu cf. 2 qui nous rend ce texte proche, avec aussi sa philosophie pratique que l'on qualifierait d'épicurienne, vu sa sobriété, ou plutôt son ascétisme relatif - compte non tenu des joies de la dive bouteille chère à Rabelais: Tibulle y revient à deux reprises: 48, 51 - si elle n'était marquée par un sens profond du religieux: PAX ne semble pas ici qu'un symbole... Il ne s'agit pas d'une petite vie étriquée, il s'agit d'un choix, d'un souhait (cf. les subjonctifs) personnel: on passe du HIC en 39, corroboré par IPSE en début de 41, pour arriver à SIC EGO SIM au début de 43; le INTEREA permet de passer à la description généralisatrice qui n'exclut pas, bien au contraire, notre poète au point qu'il semble se mettre dans la peau elle-même - IPSE en fin de 51, réitéré en fin 55 - du paysan éméché, il semble s'en exclure par le QUICUMQUE et la malédiction qui poursuit ce type de mufle; mais Tibulle semble revenir par le début du v. 61: SIT SATIS avec son allitération, et son anaphore triple, ce que confirme le QUATER en clin d’œil en 63. IL voue aux gémonies - donc à l'armé"e! - une dernière fois QUI SAEVUS ERIT, pour revenir finalement et à ses lecteurs/auditeurs ainsi qu'à lui-même, par l'opposition: AT NOBIS du 76: la récompense est assurée; ne s'agit-il pas d'un PEACE AND LOVE avant la lettre, vu ce qui précède. Et de quelle nature sont ces fruits?
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